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Personnes âgées : l'affaire de Bayonne relance le débat sur l'euthanasie

Auteur Rédaction

Temps de lecture 6 min

Date de publication 14/08/2011

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Si le médecin a donné la mort sans concertation c’est un homicide” persiste à dire Jean Leonetti

Les internautes se mobilisent sur Facebook pour soutenir le médecin de Bayonne mis en examen vendredi pour "empoisonnement".
et une pétition sur le web a recueilli en peu de jours plus de 5.000 signatures. Parallèlement Jean Leonetti, auteur de la loi de 2005 sur la fin de vie d'une part, et Emmanuel Hirsch, Président du Collectif Plus digne la vie, d'autre part appellent à modération notamment en prônant les vertus de la culture palliative.

LE POUVOIR DES RESEAUX SOCIAUX

Un groupe Facebook (977 membres) intitulé "Soutien à Nicolas Bonnemaison" et une page Facebook baptisée "Soutien à Nicolas Bonnemaison, urgentiste soupçonné d'euthanasie active" rassemblent des centaines d'internautes qui témoignent ou commentent.
Plus de 2.000 personnes "aiment" la page Facebook où nombre de commentaires évoquent des cas personnels de fin de vie.

"Il faut avoir vécu le calvaire d'un proche pour comprendre...", écrit une femme. "Soutien total, souvenir de ma mère, 87 ans, malade Alzheimer avancé qui ne voulait plus vivre." poste une autre personne. "Je pense que l'euthanasie doit être exécutée de manière très exceptionnelle", dit un autre intervenant qui soutient cependant "cet urgentiste qui a abrégé les souffrances de ses patients".

Les commentaires postés du côté du groupe "Soutien à Nicolas Bonnemaison" attestent de la virulence du débat : "Cessons l'hypocrisie ! Avec ce slogan on a légalisé l'avortement (...) et pourquoi pas le viol", s'insurge un opposant à l'euthanasie. A quoi lui rétorque un pro-euthanasie : "Je peux concevoir que vous soyez contre l'avortement et l'euthanasie (...) mais moi je veux avoir la liberté d'y avoir droit. Tout le monde devrait pouvoir avoir le choix".

Relayé par le groupe, un texte intitulé "Le sourire de lange" (libertes.blog.lemonde.fr) rédigé par un journaliste du Monde, Franck Johannès, illustre la souffrance des proches en évoquant la détérioration inéluctable de son père atteint de Parkinson. "Papa voulait mourir. Il avait essayé une fois. Même ça, ça lui a été refusé. Il ne pouvait plus parler, presque plus ouvrir les yeux, mais il entendait tout. Imaginez ce long cauchemar, ce que c'est que d'être emmuré dans son corps, dans un silence contraint, de ne plus pouvoir bouger les jambes, de ne plus pouvoir manger, ne plus arriver à aspirer un peu de jus d'orange avec une paille, puis d'avoir les mâchoires serrées à jamais, qui ne répondent plus, qui vous ferment définitivement tout contact avec l'extérieur", écrit-il notamment.

Sur le site alzheimer-parkinson.com, une intervenante se disant auxiliaire de vie, propose d'interroger les Français sur l'euthanasie par "référendum".

Parallèlement, une pétition de soutien au Dr Bonnemaison adressée au ministère de la Santé et mise en ligne sur le site www.mesopinions.com dépassait dimanche 5.000 signatures. Elle se réfère au serment d'Hippocrate et affirme que tout médecin ne doit pas "prolonger inutilement des souffrances à des personnes condamnées". "Refuser l'euthanasie aussi hypocritement, c'est ne pas respecter la vie", conclut-elle.


LES PRO EUTHANASIE RAPPELLENT LEUR POSITION

"La seule solution de bon sens est de légaliser l'euthanasie", affirme sur son blog Jean-Luc Romero président de l'Association
pour le droit de mourir dans la dignité
(ADMD), à la suite de l'affaire de Bayonne. "Tant que nous n'avons pas plus d'infos, il convient bien sûr de rester prudent, car la 1ère condition de l'euthanasie, c'est la volonté de la personne en fin de vie", écrivait-il dimanche. "Mais cette affaire montre, une nouvelle fois, l'urgence d'une loi légalisant l'euthanasie", selon son blog (www.romero-blog.fr)
"Car aujourd'hui, même s'il y a volonté du patient, le soignant risque la Cour dAssises, ce qui est scandaleux".
"En même temps, faute de cadre juridique, des aides à mourir sont pratiquées, peut-être par compassion, mais sans la volonté du patient et cela est tout aussi inacceptable bien que le serment d'Hippocrate exige aussi du médecin de soulager les douleurs sachant que cela peut conduire à la mort...Bref, nous sommes aujourdhui dans une impasse".
"Une seule solution pour sortir de lhypocrisie et des dérives : une loi légalisant leuthanasie", conclut celui pour qui la loi Leonetti actuelle sur la fin de vie "entretient le flou artistique".

L'ADMD qui milite pour l'euthanasie a lancé en juin dernier "l'appel du 18 juin pour la légalisation de l'Ultime liberté".
L'association rappelle qu'une majorité des Français sont pour cette légalisation.Et elle a bien l'intention de faire entendre sa voix auprès des candidats aux fonctions présidentielle et législatives.
Selon son site de septembre 2011 à mars 2012, un Tour de France des régions sera effectué par le président de l'ADMD afin d'expliquer et de présenter la revendication de l'ADMD, "soutenue par 94% des Français" (sondage Ifop pour le journal Sud Ouest, octobre 2010). Le site www.admd2012.fr donne les positions des élus sur cette question.

LA CULTURE PALLIATIVE POUR NE PAS LAISSER SOUFFRIR

"Si le médecin a donné la mort sans concertation, c'est un homicide" affirme quant à lui Jean Leonetti,
rapporteur de la loi de 2005 sur la fin de vie dans un interview au quotidien "Le Parisien" de ce 14 août. La loi vise à mettre fin à l’acharnement thérapeutique rappelle-t-il. L'obligation, pour le médecin c'est de ne pas laisser souffrir le patient. En concertation avec le malade, l'équipe, la famille, il peut administrer au patient des produits pour le soulager au risque d'accélérer la mort." C'est avant tout de disponibilité humaine dont on a besoin, ajoute t-il, précisant qu'aujourd'hui on prend davantage en compte la souffance en fin de vie. "Les soins palliatifs se sont beaucoup améliorés.

Pour le droit à la dignité de la personne en fin de vie, le Collectif Plus digne la vie, rappelant l'article 1 de la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, principe qui le guide « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. » publie et appelle à signer un manifeste pour pour le droit à la dignité de la personne en fin de vie.
Pour Emmanuel Hirsch, Président du Collectif Plus digne la vie, professeur d'éthique médicale, université Paris-Sud 11, Auteur de Apprendre à mourir, "Il y a trahison à la vocation du médecin de confondre l'acte de sollicitude avec le geste du meurtre."
Lire et signer le manifeste sur le site du
Collectif Plus digne la vie

La Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs (SFAP) "déplore cet événement douloureux pour les familles et les professionnels du centre hospitalier de Bayonne. Elle rappelle que la loi de 2005, dite Léonetti, relative aux droits des malades et à la fin de vie interdit tout acharnement thérapeutique et oblige le médecin à soulager les malades en fin de vie sans pour autant provoquer intentionnellement la mort. Cette loi permet à ces malades de mourir dignement et sereinement."

Retrouvez notre dossier "Fin de vie"
Lire aussi notre article "Vivre et mourir comme un homme" avec un interview de Jean Leonetti.

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