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Créer une association au sein d'un établissement - Les liens possibles entre établissements d'accueil de personnes âgées et l'extérieur, solidarité, complémentarité et enrichissement mutuel. Moyens de déculpabiliser les familles et de maintenir une

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Les liens possibles entre établissements d’accueil de personnes âgées et l’extérieur, solidarité, complémentarité et enrichissement mutuel. Moyens de déculpabiliser les familles et de maintenir une socialisation aux résidents

L’entrée en maison de retraite, aujourd’hui en Ehpad, est toujoursvécu comme une coupure, comme une sorte de renoncement à la vie antérieure. Cela provoque de lourds traumatismes et culpabilise les familles.Pourtant peu de choses sont mises en oeuvre pour maintenir des liens forts entre l’établissement et la commune, le quartier voire le pays au sens d’entité locale et culturelle.

Rien ne s’y oppose, la France compte le plus grand nombre d'associations, la loi de 1901 est très simple à mettre en œuvre, et des structures simples de quelques membres peuvent parfaitement fonctionner.

Les résidents sont porteurs de tous leurs droits de citoyens, l’Ehpad n’est pas un lieu qui retire du monde. En période électorale, les élus se souviennent d'ailleurs toujours que nos aînés ont droit de vote.

Les initiatives sont déjà une réalité, il tient à chacun de nous que cela devienne une généralité. A intervalle régulier certaines expériences seront mises en évidence avec comme objectif de provoquer de très nombreuses créations d’associations. Il sera possible de trouver sur le site d’Agevillage les modalités, simples au demeurant de créer ce type d’associations.

Aujourd’hui, le directeur de la maison de retraite de Montcuq (Lot) nous fait part de son expérience. Il s’agit d’un exemple parmi d’autres avec sa part de succès et ses limites.

Cet établissement en période de transformation, a la chance d’avoir une direction politique et administrative qui se souci beaucoup de la qualité de vie de ses résidents. Un des tout premiers signataires de la convention tripartite, partenaire loyal mais sans concession avec les tutelles, c’est un des rares établissements où l’on souhaite compléter le projet de vie général par des projets de vie individuels.

Modestement le directeur rappelle que dans son département, le Lot, d’autres établissements ont aussi des associations du même type qui fonctionnent. Dans les actions, entre le cabinet de consultant et l’établissement, la prise en compte de manière globale, attentive et toujours très respectueuse des personnes âgées a créé des complicités dont d’autres établissements profitent et profiteront. Espérons que cet article s’inscrit dans cet objectif.

Les apports d’une association autonome au sein d’une maison de retraite

L'exemple de la Maison de retraite de Montcuq, par H. Brugère, son directeur.

Dans quelques assemblées générales d’association où l’on aille, on entend le même discours, les associations manquent de bras, le bénévolat se perd et pourtant il n’y a jamais eu autant d’associations et la loi de 1901 est une des plus utilisée en France.

C’est bien la preuve qu’au-delà des difficultés rencontrées, beaucoup de personnes ressentent la nécessité de prendre et d’assumer des initiatives diverses et variées en complément (et parfois en opposition) de l’action forcément plus rigide et moins nuancée des institutions publiques.

Bien que de taille modeste, 51 lits (en cours d’extension à 67), la maison de retraite de Montcuq n’échappe pas aux contraintes réglementaires ou budgétaires qui marquent la vie d’un établissement public et peuvent parfois limiter l’expression des bonnes volontés et les envies de changement.

En fin d’année 2000 quelques membres des familles, résidants et membres du personnels ont souhaité ranimer l'ssociation Trait d’Union Inter-Génération qui avait « pour objet le financement et la promotion de l’animation pour les résidants de la maison de retraite de Montcuq». Existante depuis de nombreuses années mais mise en sommeil faute d’acteurs motivés, elle y est donc de nouveau entreprenante depuis 2001 et je souhaite, après avoir succinctement décrit son mode de fonctionnement, vous donner à l’apprécier dans ses réalisations concrètes mais aussi dans ce qu’elle amène de manière plus générale au plan de la vie sociale dans l’établissement et dans sa liaison avec l’extérieur.

Le mode de fonctionnement

Comme toute association, elle tient une assemblée générale annuelle qui élit un bureau, celui-ci est composé de 2 membres des familles, 2 résidents, 2 membres du personnel.

Le ou la président(e) a toujours été un parent d’un résident.

La première assemblée générale a été l’objet d’une discussion intéressante, certains souhaitaient faire pour les personnes âgées accueillies, ne pas les impliquer dans l’association et ne pas leur infliger l’exposé de problèmes qu’ils ne pouvaient maîtriser. Cela a permis de rappeler que si certains résidents n’étaient effectivement plus en mesure de participer à la gestion d’une association, d’autres pouvaient tout à fait prendre part aux discussions et donner leur avis sur des sujets qui les concernaient au premier chef et que ces échanges ne pouvaient être que positifs pour les uns et les autres.

Il a été précisé que cette association aurait une gestion distincte de la maison de retraite et que le directeur ne pouvait en aucun cas faire partie de l’équipe dirigeante de l’association. Celle-ci doit déterminer ses objectifs en toute indépendance. La collaboration néanmoins nécessaire se concrétise dans la gestion du temps (se mettre d’accord sur la date et la durée des animations) et des lieux qui sont mis à disposition de l’association de manière permanente ou temporaire.

Les réalisations concrètes

L’association gère une mini boutique qui fournit aux résidents des produits d’hygiène et qui sert quelques boissons durant l’après-midi aux visiteurs et aux résidents qui le désirent, elle dispose à cet effet d’un bar et d’une réserve au sein de l’établissement. Si la boutique fonctionne bien, le bar pourrait mieux faire selon la présidente.

Elle produit également des animations à l’intention des résidents et de leurs familles, faisant appel à des artistes professionnels ou bénévoles, danseurs, chanteurs, clowns ou illusionnistes. Ces après-midi situés le week-end s’ajoutent aux animations mise en place par l’établissement lui-même, ils sont l’occasion pour les animateurs de l’association d’offrir un goûter aux résidents et de vendre pâtisseries et boissons aux visiteurs qui ne sont bien sûr jamais assez nombreux.

Elle offre un cadeau de fin d’année aux résidents. Radio cassette pour sonoriser la salle à manger, aquarium sont par exemple venus agrémenter la vie quotidienne dans l’établissement.

Chaque année l’association participe avec les résidents au vide-grenier organisé par la commune. Le stand alimenté par des dons est installé devant la maison de retraite et constitue un pôle d’attraction permettant la rencontre entre personnes âgées et les nombreux amateurs de ce genre de manifestation.

Ce bilan n’a en soi rien de novateur, la plupart des établissements pour personnes âgées organisent ce type d’activités, sollicitent l’intervention de bénévoles ou d’intermittents du spectacle, ce qui peut nous distinguer, c’est le fait qu’elles soient entièrement gérées par une association indépendante et c’est bien dans ce rapport avec l’autre que me semble-t-il se révèlent le mieux ses apports bénéfiques pour la vie de la maison de retraite de Montcuq.

Les bénéfices secondaires

Cet espace de libres initiatives réservé à un groupe de personnes qui interviennent dans l’établissement permet surtout le brassage des points de vue autour de projets concrets. II permet de vérifier qu’aucun des acteurs, familles, résidents, membres du personnels ne détient de vérité absolue en matière d’animation, ni de solution miracle, chacun mesure alors les difficultés qui sont celles que nous vivons quotidiennement dans nos rapports avec des personnes âgées dont l’autonomie, la capacité de réaction ou de compréhension sont fort variables.

L’établissement a en effet une vocation d’accueil de proximité et se doit d’accueillir les personnes âgées du canton quelque soit leur degré de dépendance.

Cette confrontation est une animation en soi pour les personnes qui y participent. Les familles disposent ainsi d’un pouvoir d’intervention qui participe à dédramatiser le sentiment d’échec et d’invalidation qu’elle éprouvent souvent quand elles doivent demander l’admission de leur parent en maison de retraite et quand au fil du temps elles voient la capacité de ceux-ci se dégrader.

Elles perçoivent également que leur difficulté à accepter la dépendance de ceux qui les ont élevés est partagée par d’autres. Une vie de relation reste possible. Leur présence dans l’établissement est enrichie de projets, d’enjeux et de controverses : faut-il faire revenir ce chanteur qui avait plu à tous l’année passée ou bien tenter la nouveauté, doit-on fixer la date de l’animation au dimanche ou au samedi, pour alimenter la caisse faut-il fixer le tarif des consommations un peu plus cher ou au contraire rester modique pour favoriser la quantité, comment attirer plus de bénévoles ? Ce support est créateur de lien social.

Les résidents ont la possibilité d’intervenir dans l’association à l’égal des autres et peuvent sortir de la passivité dans laquelle chacun a tendance à les enfermer parce qu’ils sont vus de loin comme un tout identifié à ceux dont la dépendance extrême frappe le plus. Ils finissent parfois par intégrer ce sentiment au point de ne plus oser exprimer quoique ce soit sinon une plainte sur fond dépressif ou paranoïaque : « je m’ennuie, il ne me reste plus qu’à mourir, ils m’ont abandonné ici ».

L’association à elle seule n’inverse pas cette tendance, elle constitue néanmoins une ouverture qui s’ajoute et potentialise les efforts accomplis par le personnel dans le sens d’un maintien maximal de l’autonomie de chacun. Il ne s’agit en aucun cas de laisser à ces personnes un hochet à gérer pour les distraire de leur rôle de contrôle et de propositions dans les instances consultatives ou délibératives de l’établissement qui se réunissent par ailleurs de manière tout à fait conforme aux préconisations réglementaires.

Au contraire cette implication dans la vie de la maison permet à leurs représentants d’y formuler des critiques mieux fondées, plus averties des difficultés réelles et des besoins concrets des personnes accueillies.Pour le personnel, ce regard extérieur peut être vécu comme critique et erroné dans des « a priori » « de quoi se mêlent-t-ils quand ils nous disent ce que l’on doit faire et comment l’on doit s’y prendre».

C’est l’occasion de débattre et de recadrer les rôles de chacun. Cette transparence, ce partage de sentiments vécus dans les échecs comme dans les réussites rassure chacun au bout du compte parce qu’il montre la maison de retraite dans ce qu’elle tente et réalise, son image s’en trouve améliorée.J’ai voulu dans cette présentation rapide d’une expérience associative au sein d’une maison de retraite valoriser les aspects positifs.

Ils ne doivent pas faire oublier les difficultés inhérentes à la vie d’une association, bénévoles trop peu nombreux, concurrence avec les autres intervenants, conflits de pouvoir et parfois lassitude et découragement de ses animateurs.

Il n’en reste pas moins que l’association Trait d’Union Inter-Génération est un élément moteur de la vie de la maison de retraite de Montcuq. Des acteurs multiples dans une institution peuvent apparaître comme une source d’éparpillement, de risques non maîtrisés, de complexité voire de complications pour son responsable.

Quitte à paraître idéaliste, ils me paraissent en fait, toute proportion gardée, comme les corps intermédiaires qui au sein d’une société apportent de l’initiative, de la souplesse, des suggestions et la contestation. Ils sont les garants d’un état démocratique vivant.

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