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Tutelle, curatelle et protection juridique

La tutelle des majeurs

Temps de lecture 10 min

2 commentaires

La tutelle est une mesure judiciaire destinée à protéger une personne majeure et/ou tout ou partie de son patrimoine si elle n'est plus en état de veiller sur ses propres intérêts, grâce à l'aide d'un tuteur qui peut le représenter dans les actes de la vie civile.

Personnes concernées

Les personnes majeures ayant besoin d'être représentées de manière continue dans les actes de la vie civile, du fait de l'altération de leurs facultés mentales, ou lorsque leurs facultés corporelles sont altérées au point d’empêcher l’expression de leur volonté, et pour qui toute autre mesure de protection moins contraignante (curatelle, sauvegarde de justice) serait insuffisante.

Établissement du certificat médical

Toute demande d'ouverture de mesure de tutelle doit être obligatoirement accompagnée d'un certificat médical.

Ce certificat médical est rédigé par un médecin inscrit sur une liste établie par le procureur de la République, qui établit l'altération des facultés de la personne. On peut se procurer la liste des médecins agréés auprès du greffe du tribunal d'instance.

Le certificat :

  • décrit l'altération des facultés du majeur et donne tout élément sur son évolution prévisible.
  • Il précise les conséquences de cette altération sur la nécessité pour le majeur d'être assisté ou représenté.
  • Il indique si la personne est en état d'être auditionnée.
  • Ce certificat précise également l’avis du médecin sur la nécessité ou non de supprimer le droit de vote de la personne protégée.

Qui fait la demande ?

L'ouverture d'une mesure de tutelle ne peut être demandée au juge que par les personnes suivantes :

  • la personne à protéger elle-même,
  • son conjoint ou le partenaire avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité (sauf en cas de rupture de la vie commune),
  • un membre de sa famille,
  • la personne en charge de sa protection,
  • d'autres proches entretenant des relations étroites et stables avec elle,
  • le procureur de la République, qui formule cette demande soit d'office, soit à la demande d'un tiers (par exemple : médecin, directeur d'établissement de santé, travailleur social).

La demande doit comporter, outre le certificat médical, l’identité de la personne à protéger et l’énoncé des faits qui appellent cette protection.

Elle est adressée au juge des tutelles dont dépend le lieu de résidence du majeur à protéger.

Modèle de demande

Audition et examen de la requête par le juge

Le juge auditionne le majeur à protéger, qui peut se faire accompagner d'un avocat, ou, sur accord du juge, de toute autre personne de son choix.

L'audition n'est pas publique. Le juge peut décider, après avis du médecin ayant établi le certificat médical, de ne pas entendre la personne, si l'audition peut nuire à sa santé ou si la personne ne peut exprimer sa volonté. Le juge doit motiver cette décision.

Le juge peut ordonner des mesures d’information (par exemple : enquête sociale) ou demander à entendre les parents ou proches de la personne à protéger.

Provisoirement, il peut placer la personne sous sauvegarde de justice dans l'attente du jugement.

Une fois l'instruction du dossier terminée, le juge le transmet pour avis au procureur de la République, au moins un mois avant la date fixée pour l'audience.

Le juge dispose d'un délai d'un an pour rendre sa décision.

Au-delà, la demande est caduque.

Jugement et désignation du tuteur ou du conseil de famille

A l'audience, le juge entend la personne à protéger (si cela est possible), celle qui a fait la demande, et leurs éventuels avocats.

Le juge nomme un ou plusieurs tuteurs, notamment pour diviser la mesure de protection entre la protection de la personne et la gestion patrimoniale.

Le choix du tuteur se fait, dans la mesure du possible, et en tenant compte des sentiments exprimés par la personne à protéger, son contexte relationnel, les recommandations de ses proches et de son entourage, selon l’ordre de priorité suivant :

  • personne choisie par avance par le majeur, ou, s'il était à la charge de ses parents, désignée par eux dans l'éventualité où ils décèderaient ou qu'ils ne pourraient plus prendre soin de lui,
  • conjoint ou partenaire lié par un Pacs,
  • parent ou personne proche.


Si aucune de ces personnes ne peut être tuteur, le juge désigne un mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrit sur une liste dressée et tenue à jour par le préfet.

Le juge peut aussi désigner si nécessaire un subrogé tuteur.

Il est chargé de surveiller les actes accomplis par le tuteur, ou le remplace en cas de conflit d'intérêt. Lorsque le tuteur est un membre de la famille, le juge choisit, si possible, le subrogé tuteur dans l'autre branche de celle-ci.

En l'absence d'un subrogé tuteur, le juge peut aussi, pour certains actes, désigner un tuteur ad hoc, notamment s'il y a conflit d'intérêt entre le tuteur et la personne protégée.

Le tuteur est tenu de rendre compte de l'exécution de son mandat à la personne protégée et au juge.

Si nécessaire, le juge peut nommer un conseil de famille, qui désigne le tuteur, le subrogé tuteur et le cas échéant le tuteur ad hoc.

Le juge peut autoriser le conseil de famille à se réunir et délibérer hors de sa présence lorsque ce dernier a désigné un mandataire judiciaire à la protection des majeurs comme tuteur ou subrogé tuteur.

Effets de la mesure

Une tutelle réduit la liberté d'une personne. La mesure a également des conséquences pour ses biens.

Conséquences pour la personne

Une personne protégée par une tutelle prend seule les décisions relatives à sa personne dans la mesure ou son état le permet. Elle accomplit seule certains actes dits strictement personnels comme la déclaration de naissance d'un enfant.

Elle choisit notamment son lieu de résidence et a le droit d'entretenir librement des relations personnelles. Le juge statue en cas de difficulté.

Le tuteur peut prendre les mesures de protection strictement nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de son comportement, le majeur ferait courir à lui-même. Il en informe le juge.

Depuis la loi justice du 23 mars 2019, il n’est plus nécessaire d’obtenir une autorisation préalable du juge pour se marier, conclure un pacte civil de solidarité ou divorcer.

« Le tuteur peut s’y opposer s’il estime que ce n’est pas dans l’intérêt du majeur protégé, charge à lui de convaincre le juge aux affaires familiales », indique Gérard Amable, mandataire à la protection judiciaire à la protection des majeurs et co-auteur du guide Tutelle, curatelle, etc. Comment protéger un proche ?

Côté santé, le majeur protégé est libre de prendre ses propres décisions. Si le tuteur n’est pas d’accord, le juge peut être saisi, et décidera, en fonction de chaque situation, si c’est le tuteur ou le majeur qui prend la décision finale.

Conséquence pour les biens

En règle générale :

  • le tuteur peut effectuer seul les actes d'administration (par exemple : effectuer des travaux d'entretiens dans son logement),
  • seul le conseil de famille, s'il a été constitué, ou à défaut le juge, peut autoriser les actes de disposition (par exemple : vendre un appartement).

Le majeur peut faire seul son testament avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille. Il peut le révoquer seul.

Le majeur en tutelle peut faire des donations en étant assisté ou représenté par le tuteur, avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué.

Depuis la loi justice du 23 mars 2019, plus besoin d'autorisation du juge pour ouvrir un compte dans une banque dont le majeur protégé est déjà client, pour fermer un compte courant ou un livret ouvert après le prononcé de la mesure, ou pour transférer de l’argent entre deux comptes du majeur, les retraits devant toujours être autorisés par le juge.

Plus besoin d’autorisation du juge, non plus, pour souscrire un contrat obsèques ou accepter une succession.

Légende
MP : majeur protégé seul
MP+T : majeur protégé avec l’assistance du tuteur
T : tuteur seul
J : nécessite l’autorisation du juge

Durée, recours et publicité

Durée

Le juge fixe la durée de la tutelle, qui ne peut excéder 5 ans.

Le juge peut décider de la renouveler pour une durée plus longue si l'altération des facultés du majeur protégé apparaît irrémédiable, sur avis conforme du médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République.

Le juge peut alléger la mesure à tout moment.

Fin de la mesure
La mesure peut prendre fin :

  • à tout moment, si le juge décide qu'elle n'est plus nécessaire (par jugement de mainlevée), à la demande du majeur ou de toute personne habilitée à demander une mise sous tutelle,
  • à l’expiration de la durée fixée, en l'absence de renouvellement,
  • si une mesure de curatelle est prononcée en remplacement de la tutelle,
  • au décès de la personne.

Recours

En cas d'ouverture ou de refus de mettre fin à une tutelle, la personne elle-même, son conjoint (ou partenaire lié par un Pacs ou concubin), toute personne entretenant des liens étroits et stables avec la personne protégée ou son tuteur peuvent introduire un recours.

En cas de refus de mise en tutelle, seule la personne qui a déposé la demande de mise sous tutelle peut contester le jugement.

Ces recours s'exercent dans les 15 jours suivant le jugement, sa notification, ou de la remise de l’avis au procureur de la République.

La demande doit être effectuée par lettre recommandée avec avis de réception, au secrétariat-greffe du tribunal de grande instance.

Publicité de la mesure
La mesure de tutelle (ouverture, modification ou mainlevée) est portée en marge de l'acte de naissance de la personne protégée.

Premiers gestes du tuteur

Inventaire

Dans les 10 jours qui suivent l'ordonnance de tutelle, le tuteur doit procéder à l'inventaire des biens de la personne protégée.

Télécharger un modèle d'inventaire


Banques

Le tuteur doit informer par écrit le ou les établissements bancaires de sa position.

Organismes d'assurance, de sécurité sociale... doivent également être informés


Enjeux

Pour tout bien immobilier, le tuteur doit connaître :

  • sa situation géographique et cadastrale
  • son estimation
  • son titre de propriété (bien propre, indivis, en communauté…
  • son éventuelle aliénation (viager, promesse de vente, baux…)
  • ses assurances


Meubles de valeur

  • Les meubles sans réelle valeur marchande font l'objet d'un simple inventaire sous seing privé.
  • Les meubles anciens ou de collection font l'objet d'un inventaire avec évaluation par un commissaire-priseur - ou un huissier -. La copie des actes qu'ils rédigent doit être adressée au juge ou au conseil de famille.
  • Pour éviter toute contestation, il est conseillé de réaliser des photographies des meubles et de conserver tous les documents qui s'y rattachent (factures, certificats d'authenticité...).
  • Vérifiez que les objets précieux sont couverts par une assurance.


Véhicule

Une voiture ou un engin motorisé à deux roues doit être évalué et figurer à l'inventaire :

  • conserver la carte grise, titre de propriété,
  • vérifier qu'il existe un contrat d'assurance,
  • informer l'assureur de la mesure de protection


Les objets précieux

  • Bijoux, tableaux, lampes, coffrets précieux... doivent être évalués par un professionnel (commissaire-priseur par exemple).
  • Lorsqu'un coffre-fort est signalé (à domicile ou dans une banque), son contenu doit donner lieu à inventaire en présence d'un officiel (commissaire-priseur, huissier...)

Coût de la mesure

Si la mesure a été confiée à un proche (conjoint, famille, ami...), elle est normalement exercée à titre gratuit.

Cependant, le juge des tutelles ou le conseil de famille peut autoriser le versement par la personne protégée d'une indemnité au tuteur s'il y a beaucoup de biens à gérer ou que la mesure est difficile à exercer.

Ils en fixent également le montant.

Si la mesure a été confiée à un mandataire judiciaire à la protection des majeurs
, ce dernier sera rémunéré par la personne protégée.

Le montant de cette rémunération dépend des revenus de la personne sous tutelle, et est fixé par le juge.

A noter : les personnes dont le revenu est inférieur à 9605 euros sont exonérés.

Plus d'informations

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Raphaëlle Murignieux

Bonjour, le tuteur doit s'assurer que votre sœur aura un logement qui convienne à ses besoins après le 31 mai. Pour l'allègement de la mesure, je ne connais pas la charte en question. En tout cas, vous comme le tuteur êtes en droit de demander un allègement de la mesure.

Souveton

Bonjour
Je suis aidant de ma sœur.
J'ai reçu pour la 6e fois un coup de téléphone de l'agence immobilière de ma sœur afin de me signifier qu'ils n'ont pas reçu le loyer à la date indiquée dans le contrat (le 10 de chaque mois ), je précise que j'ai laissé l'ACTP à ma sœur de 2017 à décembre 2022, ce qui représente une grosse somme d'argent. Sans compter qu'elle règle chaque mois 80-85 euros de frais de gestion mensuelle (entrée 1460 euros hors ACTP).
Le propriétaire a décidé de vendre tous ses biens immobiliers au sein du même immeuble qu'occupe ma sœur.
La seule qui ne voit pas son bail renouvelé est ma sœur. Échéance 31 mai 2024.
L'agence m'assure que cela n'est pas lié.
Dois-je tout même en faire part au magistrat en charge de son numéro de dossier en sachant que c'est pour le moment l'UDAF qui "gère" ?
Je précise qu'au vu du fait que la seule action que l'UDAF a l'air d'être obligée de mener concernant l'habitation est simplement de remplir un dossier de demande de logement social. C'est moi qui mène à chaque fois des recherches sur le terrain via les agences immobilières.
De plus : sa tutrice m'explique que c'est à moi de m'occuper de faire la demande d'un allègement de la mesure (elle est sous tutelle) et qu'elle n'y voit aucun inconvénient, cependant je vois que sur la charte des UDAF , si j'ai bien compris, c'est à eux de faire les démarches Dois-je saisir un avocat fiscaliste/ droit en famille ? Cordialement merci

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