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Liberté, égalité, fraternité pour les personnes âgées

Auteur Rédaction

Temps de lecture 3 min

Date de publication 07/12/2015

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Premier chapitre : liberté

Bernard PradinesL’heure est à revisiter les valeurs fondamentales de la République. Chiche !

La liberté des personnes âgées ne va pas de soi. Outre les limitations physiologiques imposées par l’âge, les pathologies concomitantes viennent souvent ajouter leur lot de potentielles restrictions. Cette valeur fondamentale, inscrite sur la façade de nos édifices officiels, mérite aussi d’être envisagée sous l’aspect qui concerne tous les citoyens français depuis la Révolution.

La liberté est compromise, voire anéantie, par les contentions physiques, architecturales, médicamenteuses ou psychologiques quand elles ne sont pas acceptées par celles et ceux qui sont concernés. Le développement récent, voire la quasi-généralisation des digicodes, grilles et unités « protégées », euphémisme pour « fermées », doit demeurer une interrogation permanente lors de la décision de limiter des personnes âgées pas toujours désorientées.

Indubitablement, le débat est difficile car la liberté ne va pas sans la sécurité. Certes ! Pourtant, je pense que nous sommes allés trop loin dans ce sens, au domicile et en établissement. La fréquente entrée en contrainte en résidence s’accompagne de trop peu de garanties, de trop peu de recours. La possibilité d’une expertise indépendante serait bien un minimum, au moins dans les cas rares mais douloureux de refus persistant. Au risque de m’attirer des foudres, une vérification extérieure par le contrôleur général des lieux de privation des libertés ne me semble pas irrecevable, au contraire (1). Nier ce genre de nécessité serait, contre toute évidence, promouvoir l’idée qu’il n’existe aucun problème. L’effet à long terme n’en serait que davantage désastreux.

La liberté ne va pas sans l’intimité. Ainsi, ne pas frapper à la porte d’une chambre est une atteinte liberticide. D’autant plus que l’on se targue d’avoir fait de ce lieu le nouveau domicile de son occupant(e). Ainsi, l’intimité n’est pas compatible avec la promiscuité dans une chambre collective, même limitée à deux personnes. Allons plus loin : la liberté de recevoir qui l’on veut quand on le désire devrait être respectée. Elémentaire, mon cher Watson. Mais quid d’accueillir la personne de son choix et de fermer la porte pour une relation intime ? Oh, comme le chante Serge Reggiani, j’entends déjà les commentaires : ces gens n’ont plus l’âge pour ces choses. Vous y croyez, vous ?

Les peurs multiples freinent l’ouverture de nos établissements, parfois justifiées, potentiellement dangereuses comme celles de tout lieu fermé : crainte de l’œil extérieur, devoir de réserve, discrétion professionnelle, secret médical. Oui, la liberté d’expression devrait être partout respectée. La liberté de réunion associative, syndicale ou politique devrait être garantie et encouragée. Idem pour les religions qui devraient être libres d’accès ou de refus, ce qui est encore loin d’être le cas, souvent en pleine ignorance de la loi de 1905. A ce propos, voir le court article intitulé : la liberté de conscience en question. Ainsi, la démocratie, sœur de la liberté, ne devrait pas s’arrêter à la porte de l’entreprise d’hébergement et de soins.

Autrefois vivant dans la famille traditionnelle, les personnes âgées bénéficient désormais de soins professionnels, à la maison ou en établissement. Ici et là, ce sont dorénavant des organisations entrepreneuriales qui les accompagnent lors de leurs dernières années de vie. Or, ces structures ont une modalité d’organisation différente de la famille car elles sont fondées sur la fonction et le rôle professionnel, non sur la relation affective revendiquée par l’entourage proche. Par rapport à la citoyenneté, elles sont d’abord des services dont les fondements ne sont pas démocratiques mais fonctionnels. Les efforts attendus sont donc colossaux au regard de l’accueil et de la participation souhaitable des résidents et de l’implication des familles trop souvent consuméristes : « je paye et j’attends d’en avoir pour mon argent ».

N’insultons pas l’avenir si la liberté « guide nos pas » (2).


(1) Cette mesure a été préconisée par la Commission nationale consultative des droits de l’homme en France
(2) Expression issue du Chant du Départ


A lire aussi :
Deuxième chapitre : Egalité
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