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Dossier : la maltraitance financière

Auteur Rédaction

Temps de lecture 4 min

Date de publication 02/01/2017

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Moins flagrante que la maltraitance physique et médicale, la maltraitance financière touche un grand nombre de personnes âgées. En quoi consiste-t-elle ? Comment la prévenir et la repérer ? Les réponses d’Alain Koskas, président de la Fiapa (Fédération internationale des associations de personnes âgées) et expert de la question.

Maltraitance financière ou abus de faiblesse ?

maltraitance financiereSelon la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), un abus de faiblesse est « une pratique commerciale qui consiste à solliciter le consommateur afin de lui faire souscrire un contrat (souvent lors d'un démarchage à domicile) en abusant de la situation de faiblesse ou d'ignorance de la personne : âge avancé, mauvais état de santé, mauvaise compréhension de la langue française, etc. »

La maltraitance financière recouvre un champ plus large, puisqu’elle s’entend comme « tout acte commis sciemment à l'égard d'une personne âgée en vue de l'utilisation ou de l'appropriation de ressources financières de cette dernière à son détriment, sans son consentement ou en abusant de sa confiance ou de son état de faiblesse physique ou psychologique »
(Rapport de la mission sur la maltraitance financière à l'égard des personnes âgées dans les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux au Médiateur de la République, 2011).

En clair, l’abus de faiblesse consiste par exemple à vendre un deuxième abonnement téléphonique à quelqu’un qui n’en a pas besoin, tandis que la maltraitance financière peut se traduire par des dons d’argent ou de biens, des mariages arrangés ou des adoptions inopinées.

Quelle est l’ampleur du phénomène ?

Selon l’OMS, ce serait la forme la plus courante de maltraitance.

« Les principales maltraitances dont sont victimes les personnes âgées à domicile sont les violences psychologiques et les violences financières, alors qu’en établissement il s’agit davantage de négligences et de maltraitance médicale », précise le ministère de la Santé.

Reste qu’il est extrêmement difficile d’en évaluer précisément le nombre en l’absence d’un observatoire dédié.

Alain Koskas, auteur de deux rapports sur le sujet en 2008 et 2011, est actuellement en train de travailler sur un troisième rapport à la demande de Pascale Boistard, secrétaire d’Etat en charge des Personnes âgées et de l’Autonomie.

Il souligne que les personnes âgées, dans bien des cas, n’osent pas en parler. « Ils ne veulent pas charger leur famille ou leurs aidants, et ont souvent honte de ces situations », explique-t-il. « Surtout s’ils retirent un bénéfice secondaire de l’affaire. »

La double emprise

« Les phénomènes d’emprise sont très complexes, surtout dans un système de double emprise où la victime trouve aussi son compte », poursuit-il.

« Les prédateurs s’appuient sur l’isolement social des aînés, leur besoin de se sentir utiles, faire partie de la société, de leur quête d’insertion sociale et socio-affective. Il faut réfléchir, aussi, à ce que nous pouvons substituer à ce qu’apporte le prédateur à la personne âgée. »

Quelles solutions ?

Pour Alain Koskas, il faut d’abord mesurer et comprendre le phénomène. « Il se diversifie et s’organise, avec des réseaux qui disposent de listes, qui pratiquent l’usurpation de titres… », indique-t-il.

Mais aussi proposer des solutions locales, lutter contre l’isolement des seniors et former aidants, professionnels et bénévoles à la question.

Reconnaître les signaux d’alerte

La fédération 3977 en donne la liste sur son site internet, et rappelle que plus ils sont nombreux, plus le risque est grand.

En ce qui concerne la maltraitance financière, il faut se montrer vigilant si :

- la personne âgée chamboule radicalement l’organisation de son quotidien ;
- elle accorde soudain une grande confiance à un tiers ;
- elle est dépendante financièrement ou psychologiquement ;
- son humeur se trouble, elle devient triste, amère ou agressive ;
- elle vit de manière de plus en plus isolée.

Le rapport de 2011 invite par ailleurs à se poser trois questions :

- Les opérations constatées sont-elles conformes aux habitudes de la personne âgée ?
- Ses besoins continuent-ils d’être assurés ?
- Y’a-t-il consentement éclairé ?

A noter : les personnels des services d’aide à domicile, les bénévoles qui y sont rattachés, les accueillants familiaux et les employés de maison qui contribuent au maintien à domicile ne peuvent pas recevoir de dons qu’il s’agisse d’argent, de biens ou autre (loi d’adaptation de la société au vieillissement, articles 28 et 29).

Et en cas de doute ?

« Appelez le 3977 », martèle Alain Koskas. « Les professionnels qui vous répondront sauront solliciter les acteurs de proximité – Clic, services sociaux… - pour résoudre le problème. »

D’autant que depuis février, la fédération 3977 travaille sur ces questions en partenariat avec l’ordre des experts-comptables.

Et n’hésitez pas à en parler autour de vous, notamment entre aidants, pour alerter sur le risque et partager les solutions que vous aurez mises en place.
Le rapport sur la maltraitance financière sera remis à Pascale Boistard le 15 février 2017 au plus tard.

A lire : Prévenir la maltraitance financière des personnes âgées, Jean-Charles Orsini
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