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Des retraités presque centenaires défendent leur club de loisir à Berlin

Auteur Rédaction

Temps de lecture 2 min

Date de publication 29/07/2012

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Une occupation de seniors, c’est du jamais vu”

Certains des occupants sont presque centenaires, et ils défendent leurs cours de macramé ou de gymnastique dans une villa qui fut celle du redouté chef de la police secrète est-allemande (Stasi): même à Berlin, le squat de la Stille Strasse étonne.
Au numéro 10 de cette "Rue Tranquille" (sic) du quartier résidentiel de Pankow, au nord de Berlin, une maison familiale se détache des autres par les banderoles "Bas les pattes!" et "Cette maison est occupée". A priori, rien d'extraordinaire dans la capitale allemande, habituée aux occupations de bâtiments. A Berlin-Ouest, dans les années 1980, de nombreux immeubles vides furent investis par de jeunes militants contre la spéculation immobilière, avant que le mouvement se propage dans toute la ville après la chute du Mur.
Mais dans la Stille Strasse, la moyenne d'âge des occupants se situe autour de 70 ans. Cachée derrière de grands arbres, la maison abrite depuis 15 ans un club de seniors, où 300 retraités de 65 à 96 ans suivent des cours de langues étrangères, de gymnastique, de dessin et jouent aux cartes. Avant eux, cette grande bâtisse a accueilli une page sombre de l'histoire: elle fut la résidence, dans les années 1950, de l'ancien chef de la Stasi (police secrète de la République démocratique allemande), Erich Mielke.
Fortement endettée, la mairie du quartier de Pankow a décidé de vendre la maison, qui nécessite une réhabilitation de 2,5 millions d'euros. Elle projette de répartir les activités du club dans différentes installations existantes. En mars, l'annonce en est faite aux retraités, qui posent leurs conditions: "Nous étions prêts à déménager, mais dans le quartier, et tous ensemble. Nous refusons de nous séparer", explique Doris Syrbe, 72 ans, présidente du Club des seniors.
Les négociations n'aboutissant pas, les retraités décident d'occuper le bâtiment à partir du 29 juin: "La maison devait être fermée pour l'été et nous avions peur de ne plus pouvoir rentrer après les vacances", raconte cette femme énergique à l'allure soignée, ancienne ingénieur en télécommunications. "Nous avons toujours dit qu'en désespoir de cause, nous occuperions la maison. Les politiques ne nous ont pas crus", ajoute-t-elle dans un sourire satisfait.
Comme elle, six retraités occupent désormais la villa en permanence, épaulés par une vingtaine d'autres pendant la journée. Au fil des jours, les occupants ont mis en place une organisation bien huilée. "Nous ne sommes pas encore bons pour l'hospice", s'amuse la présidente du club. Des lits de camp ont été installés pour les occupants permanents dans les différentes pièces de la maison, d'une propreté impeccable. En cuisine, au téléphone, à l'entrée, les retraités se relaient pour répondre aux nombreuses sollicitations des journalistes et accueillir les manifestations de soutien des voisins, verbales ou sous forme de gâteau.
Certains partis, tels Die Linke (extrême gauche) et le Parti des pirates, soutiennent également l'initiative. Les occupants se disent surpris et touchés par cette solidarité, et notamment du soutien de nombreux jeunes. Sven Schwabe, 26 ans, étudie les mouvements sociaux à l'université de Düsseldorf (ouest) et a accouru en entendant parler de cette mobilisation. "De plus en plus de retraités participent à des mouvements de protestation. Mais une occupation de seniors, c'est du jamais-vu", analyse-t-il.
Pourtant, l'occupation du club de loisirs pourrait servir de modèle au-delà des frontières de Berlin. "Nous recevons des appels de retraités dans des situations similaires, qui nous demandent des conseils. Nous sommes précurseurs, mais nous ne resterons pas seuls", affirme Doris Syrbe. Et leur combat n'est pas perdu d'avance: le conseil d'arrondissement de Pankow doit se réunir fin août pour décider de l'avenir de la maison.

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