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Elections présidentielles 2012 - Les retraités populaires ont limité la percée lepéniste. Jusqu'à quand ?

Auteur Rédaction

Temps de lecture 3 min

Date de publication 03/09/2012

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Analyses de sociologues : Serge Guérin, Bernard Ennuyer

Le Monde du 28 août 2012 a publié un article intitulé "Les retraités pauvres, un vote-clé" par Serge Guérin, sociologue, professeur à l'ESG-Management school, et Christophe Guilluy, géographe, directeur du bureau d'études MAPS.

Leur thèse et analyse (extraits)
"Les retraités représentent le tiers des ménages en France (...) et près de 65 % d'entre eux sont issus des milieux populaires (anciens ouvriers, employés ou agriculteurs).
Comme leurs cadets des classes populaires, ces retraités vivent dans une relative "fragilité sociale". Cela se traduit d'abord en termes de pouvoir d'achat.
Avec des retraites moyennes de 1100 euros, ils viennent trouver refuge dans la "France périphérique", dans les espaces ruraux, industriels, périurbains, les villes petites et moyennes. (...)
La carte de la France populaire et celle de la France des retraités populaires sont identiques. (...) Ils sont sous-représentés en région parisienne et en Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Les retraités populaires supportent ainsi le destin des classes populaires au temps de la mondialisation : une forme de relégation sociale et culturelle."

A cette réalité s'ajoutent d'autres peurs comme "Une inquiétude liée à la peur de la solitude et de la dépendance. Peur de ne pouvoir financer seul une entrée en maison de retraite ou le recours à des services à la personne".

Selon les auteurs, contrairement aux plus jeunes "les retraités populaires résistent encore aux sirènes du discours frontiste. Ils votent plutôt à droite, considérant que la gauche n'a fait qu'accompagner la désindustrialisation et la dévalorisation du travail et des classes populaires. Mais encore très peu pour l'extrême droite".
Ces retraités "populaires ont une conscience claire que leur pension, même modeste, leur assure une forme de "protection face à la mondialisation" et une intégration culturelle à un système hérité, celui de l'Etat-providence, des "trente glorieuses". Un héritage qui offre donc une relative intégration sociale et culturelle, et explique que ces catégories soutiennent les deux grands partis de gouvernement, continuateurs de cette période".
Jusque quand durera cette résistance ? s'interrogent les auteurs
Enjeux des territoires, de l'aide aux aidants, des services professionnels disponibles et accessibles...
"Le gouvernement est devant un choix de société : ignorer ou dénier la situation de ces populations et des territoires, au risque d'aggraver les fractures sociales et de réduire son assise populaire, abandonnant ainsi tout projet de transformation ; ou imaginer une politique de reconnaissance et d'accompagnement cohérente de ces publics marginalisés et précarisés, permettant ainsi d'inventer une vraie solidarité entre les générations, les cultures et les territoires. Celle fondée sur la fraternité et la justice, sur l'égalité et le partage" concluent les auteurs.

Commentaires de Bernard Ennuyer, sociologue, expert des questions du vieillissement
Celui-ci est "plus que sceptique devant une analyse qui naturalise une catégorie de personnes: "retraités pauvres", "retraités populaires», "seniors" et fait apparaître une fausse homogénéité sociale. Les « retraités populaires » qui, selon cet article, regrouperaient 65% des retraités sont donc environ 10 millions: les chiffres moyens cachent comme chacun sait d'énormes disparités individuelles en fonction du genre, du lieu d'habitat, du statut d’occupation de cet habitat, du niveau d'éducation, du parcours professionnel, du statut matrimonial, de l’état de santé, etc".
"
L’effet de génération est peu analysé par votre article alors que les "retraités" aujourd'hui recouvrent deux, trois, voire quatre générations suivant là aussi la définition qu'on donne à ce vocable".
Pour Bernard Ennuyer "
on ne peut caricaturer les « retraités pauvres et populaires » à travers le concept global de « fragilité sociale » qui, beaucoup d'études sociologiques récentes l'ont démontré, concerne plus de 50% de la population française actuelle suivant la façon là aussi discutable, selon laquelle on définit cette notion."
Il souligne lui aussi "la responsabilité qui est , en démocratie, celle d’un gouvernement (quel qu’il soit) autour du thème de la solidarité qui m'est cher, mais les "retraités pauvres" en tant qu'ils restent des citoyens ne me paraissent pas en tant que tels détenir un rôle clé vis-à-vis du Front National plus important que d’autres citoyens, comme le titre de votre article le sous-entend."

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