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Amoureux de la planète aux âges avancés aussi !

Auteur Annie De Vivie

Temps de lecture 4 min

Date de publication 12/02/2024

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La prise de conscience des enjeux du réchauffement climatique monte à tous les âges comme le montre une étude de Leroy Merlin Source. Mêmes constats pour le sociologue spécialiste des séniors Serge Guérin qui publie un livre, Et si les vieux aussi sauvaient la planète. Il milite pour déminer la culpabilisation des seuls boomers boucs émissaires vers une mobilisation intergénérationnelle pour prendre soin de la planète et des humains.

Les jeunes retraités et la transition écologique ? Une étude Leroy Merlin Source

Les chercheures Mélissa-Asli Petit et Anne-Bérénice Simzac ont passé au crible comment les jeunes retraités appréhendent la perspective du changement climatique, dans le cadre du programme de recherche Leroy Merlin Source.

Elles mettent en avant les usages liés à des « habitudes familiales transmises qui s’ancrent dans des traditions familiales plus ou moins prégnantes ». Par exemple, limiter sa consommation d’eau lorsque l’on se lave, faire son compost car « on a toujours fait comme cela ». Ces pratiques quotidiennes ne sont pas conscientisées, sans lien avec la conscience écologique.

C'est tout le contraire pour les écogestes tout à fait conscientisés : « prendre son vélo plutôt que sa voiture, installer un mousseur sur son robinet, faire le tri de ses déchets ou encore réduire de quelques degrés son chauffage. Certains isolent leur logement, s’équipent en électroménager moins consommateur d’énergie ou changent leur vieille chaudière pour un modèle plus sobre ».

Des jeunes retraités vont jusqu'à ce que les chercheures appellent « la pratique environnementale », qui regroupe un ensemble d’actions quotidiennes formant un mode de vie tourné vers la préservation de l’environnement.

Mélissa-Asli Petit et Anne-Bérénice Simzac ont identifié 5 profils de retraités sur ces enjeux :

  • les militants : ils ont une pratique environnementale qui se forge dans des usages liés à au moins une habitude familiale plutôt frugale. Puis qui se déploie depuis leur vie d’adulte dans de multiples écogestes.
  • les méfiants qui ne s’inscrivent pas dans la mise en œuvre d’une pratique environnementale. Les gestes du quotidien effectués peuvent être liés à des habitudes familiales, qu’ils ont intégrées comme allant de soi sans mettre en perspective leur impact sur l’environnement.
  • les économes qui ne développent pas de pratique environnementale malgré la pratique de nombreux écogestes.
  • les modérés qui tendent vers une pratique environnementale tout en aspirant à la cohérence et à l’impact de leurs actions.
  • les paradoxaux qui ont l’intention d’avoir une pratique environnementale, mais n’en ont pas au regard de leurs actions quotidiennes. Ils endossent des postures de militants sans les traduire par des écogestes.

Et si les vieux aussi sauvaient la planète ? questionne Serge Guérin

Le sociologue estime lui aussi que la prise de conscience des enjeux climatiques varie.

Elle n'est pas tributaire de l'âge mais du profil socio-économique, du parcours de vie, du lieu de vie. Serge Guérin insiste sur l'importance des inégalités sociales, culturelles, géographiques (p. 48), les inégalités d'accès aux services publics (il a vu des « gilets gris parmi les gilets jaunes », p.138).

« Il n'y a pas d'âge pour refuser le réel », rappelle le sociologue (p. 58).

Alors que le réchauffement climatique se voit aujourd'hui en France (températures anormales, incendies, inondations), il rappelle qu'en 2028 les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 20 ans.*

Et si 37 % des Français se disaient intéressés par le dérèglement climatique, ils sont 47 % chez ces plus de 65 ans, selon un sondage Viavoice de 2023 (p. 32).

A grand renfort d'études et sondages récents, Serge Guérin démine les pièges, les stéréotypes, les impensés, avec la verve qui le caractérise : jeunes écolos contre vieux pollueurs ?

Il estime qu'on ne peut se passer de générations, et donc des vieux, pour faire face aux enjeux, pour prendre soin de notre bien commun "One health". Face aux conflits, aux dissensus, il martèle l'importance de défendre, de travailler la démocratie pour faire avec, faire face.

Reste que la coopération entre les générations demande du temps et des efforts pour décarboner nos sociétés
.

Or les pistes de solutions permettent aussi d'aider à mieux vivre avec, de faire face ensemble aux deux défis avec :

  • des transports plus doux, plus collectifs, avec des covoiturage intergénérationnels (comme En voiture Simone, p.128),
  • des habitats repensés, partagés, accompagnés,
  • des espaces de vie végétalisés,
  • des services culturels accessibles, voire itinérants comme Théâtre éprouvette et sa camionnette d'alimentation culturelle dans la Nièvre,
  • des applications en ligne pour lutter contre l'isolement et favoriser des réseaux de proximité : Wello, Entourage solidaire, Chers voisins…
  • des seniors impliqués, mobilisés, "au travail" dans les entreprises, dans les associations : C Possible seniors, Lire et faire lire dans les écoles, Egee… tout en citant Camus (p.210) : « Sans travail, toute vie pourrit. Mais sous un travail sans âme, la vie étouffe et meurt »,
  • des solutions de santé de proximité, avec des services à domicile qui créent ensemble un comité d'oeuvre sociale (COS) équivalent d'un comité d'entreprise comme dans l'Essonne (p. 205), comme ces Ehpad ressources chez Clariane notamment (Serge Guérin est président du comité scientifique de la Fondation Korian).

L'auteur déploie un plaidoyer pour la prévention : « le seul moyen de créer du lien ». Il regrette qu'elle représente 2 % de nos budgets contre 8 % au Québec (p.235).

Inventant le terme d'écoseniorisation des espaces, Serge Guérin milite en fait pour des Villes Amies des Aînés, cf. le label de l'OMS.

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