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Comprendre les fragilités

Conduite automobile et troubles cognitifs : des pistes pour dépasser le fort déni

Auteur Annie De Vivie

Temps de lecture 4 min

Date de publication 24/04/2023

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La Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG) et la Fondation Médéric Alzheimer mènent plusieurs enquêtes concernant la conduite automobile et les troubles cognitifs. Les premières études attestent d'un fort déni des difficultés aussi bien chez la personne malade que chez les conjoints. De l'importance du rôle du médecin traitant quand la décision d'arrêter la conduite s'impose et de solutions pour compenser qui restent sous-exploitées et peu connues.

Affronter le déni des difficultés de conduire

Les différentes revues de la littérature scientifique, études et sondages montrent que dans 90 % des cas, les personnes malades conductrices déclarent être à l’aise pour conduire leur voiture et la conduisent de manière très régulière, au moins une fois par semaine. Seules un tiers envisagent d’arrêter, seulement 8 % dans les 6 prochains mois. Ce déni très fort est souvent partagé par les conjoints qui minimisent ou compensent les difficultés en servant de guide, de soutien, tandis que les proches extérieurs au couple constatent les manquements.

Une des explications probables selon la SFGG est que la personne malade est la principale personne qui conduit et permet la mobilité intrafamiliale.

Renoncer à la voiture est une étape complexe.


Plus de 8 personnes âgées de 75 ans et plus sur 10 le décident volontairement ou s'autorégulent : ils ne conduisent pas la nuit, évitent les ronds-points, les trajets compliqués, changent de voiture pour un véhicule plus petit et plus simple à conduire en milieu urbain…

Mais c'est tout l'inverse chez les personnes malades. Dans 76 % des cas, cette décision est imposée par la famille, de manière unilatérale, suite à une succession d’incidents autour de la voiture. Les évènements plus graves sont plus rares : seules 15 % des personnes malades ont eu un accident ayant entraîné un constat et seulement 10 % ont commis une infraction ayant entraîné une amende dans les six mois précédent l’arrêt de la conduite.

Mais cet arrêt de la conduite est mal vécu par une majorité de personnes malades (58 %). Les familles aussi le vivent mal. Elles culpabilisent de trouver des stratégies empêchant la conduite comme cacher les clefs, débrancher la batterie, prêter la voiture à un proche ou simuler un vol…

Les pistes quand l’arrêt de la conduite se profile

Alors que 55 % des personnes malades ne se sont pas senties soutenues par leur médecin au moment de l’arrêt de la conduite, 38 % des aidants et 23 % des personnes malades aimeraient qu'il prenne cette décision.

La SFGG constate que lorsqu'on interroge les médecins, ils ne se sentent pas être une figure d'autorité, ni avoir les outils pour évaluer et accompagner.

C'est alors la famille qui prend la décision.

Pourtant, un parcours officiel existe avec la commission du permis, la commission médicale, mais les études constatent que seuls 2% des personnes y ont eu recours.

Par ailleurs, les accompagnements pour maintenir une conduite sécurisée existent, mais seules 12% des personnes malades y ont participé. Des réunions, conférences sont organisées par la mairie, la police, la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), la Prévention routière, la Sécurité routière, France Alzheimer, IRP Auto…

Seules 8 % des personnes malades ont participé à des stages de conduite automobile avec un moniteur pour se perfectionner. Enfin, seules 5 % des personnes malades ont participé à des stages de récupération de points

Des pistes pour compenser le retentissement de l’arrêt de la voiture

Les études montrent que l’arrêt de la conduite a un retentissement dans la vie de 37 % des personnes malades : arrêt des activités culturelles, sociales, familiales, moins de sorties (restaurants, amis, famille).

Cela peut entraîner une désocialisation, voire un isolement social délétère.

Des solutions existent tant pour compenser l’arrêt de la conduite, mais elles sont sous-exploitées et peu connues.

La première piste qui émerge des études est le covoiturage avec un proche. 85 % des personnes malades y ont recours au moins une fois par mois et 55 % au moins une fois par semaine.

78 % des personnes malades recourent à la marche à pied au moins une fois par mois et 56 % au moins une fois par semaine.

Les transports collectifs sont utilisés en milieu urbain, mais nettement moins en milieu rural, sachant que 60 % des personnes interrogées ne les ont jamais empruntés.

Il existe des services d’aide tels que des accompagnateurs pour des activités (courses, coiffeur, médecin, famille…) qui sont sous-exploités puisqu’ils ne sont utilisés que par 29 % des personnes malades.

Seulement 27 % des personnes malades et 16 % des seniors non-conducteurs utilisent les services de livraison de courses à domicile, même si 70 % savent que ces livraisons sont proposées de manière gratuite. Les raisons évoquées sont la complexité d'accès à Internet, la difficulté et le risque de payer par carte bancaire.

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